• 14-18 en Pays Cordais

    12 avril 1914, c'est Pâques ! Le pays Cordais émerge d'un hiver particulièrement rigoureux : fortes chutes de neige, pointes de froid descendant allègrement en dessous de moins 10, fontaines et lavoirs transformés en blocs de glace... on n'avait pas connu un tel hiver depuis 1870. On se demande si les malheurs ne vont pas recommencer...

    Quelques Cordais lisent les journaux, les nouvelle sont loin d'être rassurantes. Mauvais signe, le service militaire a été porté à trois ans, Jaurès, que l'on connaît bien en pays cordais, s'époumone à crier « non » à une entrée en guerre mais sa voix est arrêtée d'un coup de revolver.

     

    14-18 en Pays Cordais

    Dessin de poilu par Georges Scott – L'Illustration

     

    Le 1er août tout bascule, les églises sonnent le tocsin : désormais le spectre de la mort va étendre son ombre sur le pays cordais. Loin de la littérature parcourons les archives, débusquons ce qui se cache sous la sécheresse des dates et des chiffres ! Début août arrive à Cordes l'ordre de mobilisation générale provoquant immédiatement le départ des hommes concernés. Or avant la fin de ce même mois, le 28 août, Émile Souillé, de Cordes, est tué au Bois de Vulcain en Meurthe et Moselle. Et c'est une véritable litanie de mort qui s'enclenche. Quand on étudie les dates de disparition des soldats originaires du canton cordais on s'aperçoit que durant quatre ans il est rare qu'une semaine puisse 's’écouler sans qu'un nom s'ajoute à la liste. A Cordes et dans les villages des alentours tout le monde se connaît et bon nombre de familles ont des liens de parenté. A chaque rencontre l'annonce d'une disparition d'un parent ou d'un ami remplace petit à petit le bonjour habituel. La mort au front, non pas d'abord les circonstances concrètes que l'on ne connaît pas et qui sont en fin de compte secondaires à ce moment-là, mais ce fait de la perte définitive d'un membre de la famille et de la communauté devient le sujet de conversations qui occupent progressivement le terrain de la vie sociale, au hasard d'une rencontre, au lavoir, au marché du samedi, à la sortie de la messe du dimanche au cours de laquelle le prêtre invite les paroissiens à prier pour un nouveau défunt de la communauté.

     

    14-18 en Pays Cordais

    Photo de tranchée près de N.D. De Lorette en avril 1915 – photo prise par F. Lentz

     

    Ce vide s'installe dans les familles, les lieux de travail, les commerces devient une hantise. Surtout qu'il n'y a pas que les morts reconnus officiellement : les « disparus » réapparaissent quelquefois mais des mois plus tard parce qu'ils étaient simplement prisonniers, d'autres, déserteurs, sont passés à la clandestinité et on se garde d'en parlé à voix haute, parfois on entend dire qu'il y a eu des fusillés, comme Firmin Durand de Carmaux le 30 juillet 1915... Quatre longues années où les deuils deviennent d'autant plus insupportables qu'ils s'accumulent sur un espace social restreint : moins de 7000 habitants pour le canton, pas même 1500 pour Cordes après le départ des mobilisés.

    N'est-ce pas une invitation pour chacun de nous à dépasser les clichés, pittoresques ou effroyables, de cette Grande Guerre pour s'approcher du cœur de ces hommes et de ces femmes, de ces vieillards et de ces enfants, qui ont eu le courage de continuer à faire vivre le Pays Cordais ?

    Article paru dans Cordes Infos


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