• histoire des lieux d'aisances (2ème partie)

    « Se retenir »

    Les premiers cabinets d'aisances en un lieu public virent le jour au palais-Royal peu avant la Révolution. Les vespasiennes, premières du nom, seraient apparues en 1830 sur les boulevards parisiens, précédant de onze ans celles du préfet Rambuteau. En 1843, Paris disposait de 468 urinoirs. Sous le Second Empire, le baron Haussmann prit le relais. A chaque rue son édicule... pour les hommes. Il fallut attendre les années 1870 pour voir apparaître les premiers chalets de nécessité. Ils accordaient aux Parisiennes les mêmes facilités qu'à leurs marie mais... en payant. Quant aux femmes du commun, la longueur des jupes facilitait la chose, surtout grâce au pantalon fendu.

    Hygiène, esthétique et ordre public conjugués, dans les années 1930 on commença à faire disparaître discrètement urinoirs et chalets de nécessité au risque d'embouteiller les lavatories souterrains.

    En 1960, cent trente vespasiennes disparaissent à Paris tandis qu'aucun lavatory n'avait été construit depuis 1939. Il fallut attendre 1977 et le retour d'un maire, 106 ans après la suppression de l'institution, pour voir l'apparition des sanisettes. Une initiative bientôt suivie en Province.


    Vespasienne du XIXème siècle détrônée début 1980 par la sanisette

    Aujourd'hui, celui des bipèdes résolu, un nouveau péril fécal (et financier) menace nos villes : les déjections canines...

    aux cabinets à l'anglaise

    Si les égyptiens rangeaient les fèces aux nombres de leurs idoles, leurs médecins s'intéressèrent très tôt aux vertus thérapeutiques de l'urine .

    N'était-elle pas susceptible d'apporter de l'éclat à l'émail des dents voire de rendre les femmes fécondes à la condition que le pissat appartint à un eunuque ?

    Dans la tradition antique de la médecine, l'examen attentif des urines était riche d'enseignement. Dès lors, l'urinal devait être en verre.

    Au Moyen Âge, il trouvait sa place sous les lits à côté des pots en terre.

    De la chaise percée...

    A la même époque, alors que les gens de basse condition se soulageaient le cul à l'air, les personnes de haute qualité s'exonéraient sur les chaises percées. Ainsi, le pudique Louis XI disposait d'une « chaire retrait » entourée de rideaux tandis que ses comptes révèlent qu'il achetait de l'étoupe de lin, l'ancêtre du papier hygiénique (inventé aux États-Unis).

    Le cardinal de Richelieu optera pour le chanvre et Madame de Maintenon pour la laine de mérinos... Quant aux pauvres, feuilles, herbes, cailloux et papier journal ont fait l'affaire jusqu'aux années 1960... Mais revenons à la chaise percée. C'est sur l'une d'elle qu'en 1589 Henri III tomba sous les coups de poignards du moine Jacques Clément. On sait également que Louis XIII recevait sur ce trône, de même que son fils Louis le Grand.

    Le XVIème siècle constitua un tournant s'agissant de la question des lieux d'aisances dans l'habitat.

    Généralement situés au centre du logis lorsqu'ils existaient, leur éloignement au grenier ou dans le jardin se précisa. Cela tint moins à la vue qu'à l'odorat. Du temps de la libre pissette, le mot de pudeur n'avait guère de signification. C'est ainsi qu'au Grand Siècle, lorsque les dames de la cour allaient écouter les longs sermons du père Louis Bourdaloue, elles se munissaient ostensiblement d'un petit vase auquel, bientôt, le jésuite donna bien involontairement son nom. Dans le même temps, le pot de chambre, souvent baptisé Thomas (allusion à l'antienne « Vide Thomas », poursuivait sa carrière, la faïence et la porcelaine se substituait au métal qui finissait par sentir.

    ...aux water-closets

    Au XVIIIème siècle, les Tuileries étaient un des lieux les plus empuantis de Paris. Le château et les jardins de Versailles n'avaient rien à leur envier même si Louis XV disposait d'un « cabinet de soupape ». Alimenté en eau au moyen de réservoirs placés en hauteur, ce dernier était muni d'une valve actionnée par un bouton de tirage tandis qu'un tuyau de plomb évacuait la matière vers une fosse. Ce fut le timide début des cabinets à l'anglaise, deux cents ans après leur invention en Grande-Bretagne. Dans l'immeuble haussmannien du XIXème siècle, le vase de nuit et le seau hygiénique en métal vécurent encore de beaux jours. En effet à Paris, l'eau courante n'atteignit le sommet des maisons de la rive droite qu'en 1865.

    L'année 1883 marqua, avec l'éloge de la chasse d'eau, une date dans la campagne des hygiénistes en faveur des water-closets. En 1936, la trombe d'eau fit une entrée remarquée tandis que la cuvette en porcelaine blanche, avec abattant de chêne ou d'acajou, s'était généralisée dans l'entre-deux-guerres. Elle devin d'un usage à peu près courant dans les villes après 1945, avec la reconstruction en Europe.

    Cuvette moderne

    Cependant, dans les campagnes, les « bonnes vieille méthodes » se maintinrent jusqu'à l'avènement du tout-à-l'égout, dans les années 1950-1960, selon les régions.

    Article paru dans L'Indépendant


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