• Philae : Les secrets d'une première mondiale

    Le petit robot est le premier engin à s'être posé sur une comète, après un voyage de dix années dans l'espace. Truffé de technologies, il va nous aider à mieux comprendre les origines du système solaire.

    Après un voyage de 10 ans, durant lequel il aura parcouru plus de 7 milliards de kilomètres. Philae est devenu, le 12 novembre, une star planétaire. Le robot est parvenu, après s'être détaché de la sonde Rosetta, à se poser sur la comète Tchouri qui tourne autour du soleil à 65000 km/h. Un exploit piloté par l'Agence spatiale européenne. L'objectif ? Étudier la composition du sol de l'astre et les caractéristiques de son noyau. Avec l'espoir de mieux comprendre le rôle des comètes dans la formation du système solaire et des océans terrestres, ainsi que dans l'apparition de la vie sur notre planète. Pour mener à bien sa mission ce cousin de Wall-E a été gonflé de technologies.

    Philae a beau ne pas être bien grand – 1 mètre de diamètre et 80 centimètres de hauteur pour 100 kilogrammes -, il transporte un véritable laboratoire. Grâce à sa foreuse et à ses 26 petits fours, il peut collecter des échantillons du sol et les chauffer afin d'étudier les gaz gelés qui s'en dégagent. Il dispose également de capteurs, de sondeurs électriques et acoustiques, d'un analyseur de plasma, d'un magnétomètre et d'un radar permettant de sonder le noyau de la comète.

    Des processeurs immunisées contre les radiations.

    Le robot est équipé de 13 processeurs capables de supporter les importantes radiations du milieu spatial : ils résistent à des doses plus de 30 fois supérieures à ce qu'encaissent les puces traditionnelles. Il ne peut stocker que 7 Mo de données scientifiques, mais vide régulièrement ses mémoires en nous envoyant son contenu.

    Une pile hyperrésistante.

    Conçue pour résister aux chocs, aux températures extrêmes et aux accélérations, une pile a permis à Philae de se poser et de prendre ses premières mesures. Une batterie, rechargeable grâce à ses panneaux solaires fonctionnant à basse température et sous un faible taux d'ensoleillement, devrait prendre le relais. Une phase reportée, Philae étant sur un site moins éclairé que prévu.

    Huit caméras miniatures.

    Le robot dispose de huit caméras miniatures, l'une pointant vers le sol, les sept autres sur les côtés. Elles peuvent réaliser des images panoramiques (dont une portion en 3D). Elles sont ultralégères (100 grammes l'une), peu énergivores et résistantes à -150°C. Les clichés, eux, sont transmis à Rosetta qui les envoie vers la Terre, distante de 500 millions de kilomètres, en vingt-huit minutes !

    Article paru dans 01Net-Magazine


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  • Il y a 40 ans, Simone Veil montait à la tribune

    A 16h, il y a 40 ans, Simone Veil montait à la tribune. | Archives AFP.

     

    Il y a quarante ans, après trois jours de débats passionnels et virulents, les députés approuvaient le texte autorisant sous conditions l'IVG (Interruption volontaire de grossesse).

     

    Six ans après mai 68, le contexte

     

    Président de la République à 48 ans. Le 27 mai 1974, Valéry Giscard d'Estaing (Républicain indépendant) devient le troisième président de la Ve République. Il a battu sur le fil François Mitterrand, candidat de l'Union de la gauche, avec 50,8% des suffrages. Il a 48 ans. Mai 68 a bouleversé le paysage. L'opinion a contraint les élus à inscrire les questions de société à l'agenda politique. Le nouveau président affiche sa volonté réformatrice. Il veut abaisser l'âge de la majorité de 21 à 18 ans, instaurer le divorce par consentement mutuel et, surtout, dépénaliser l'avortement.

     

    Il y a 40 ans, Simone Veil montait à la tribune

     

    L'angoisse de « tomber » enceinte. En 1974, les contraceptifs sont mal connus, les mineures ont besoin de l'autorisation de leurs parents pour prendre la pilule. Seules 7% des femmes utilisent un contraceptif. Des milliers « tombent » enceintes et refusent ces grossesses non-désirées. Beaucoup ont déjà des enfants. Elles se sentent piégées, isolées, démunies. Panique : que faire puisque l'avortement est interdit ?

     

    En prison. Selon l'article 317 du Code pénal, loi de 1920, « quiconque, par aliments, breuvages, médicaments ou violences aura procuré ou tenté de procurer l'avortement d'une femme enceinte sera puni d'un an à cinq ans de prison, et d'une amende de 1 800 à 36 000 francs. » Quant à la femme qui aura avorté ou simplement « tenté » de le faire, « elle sera punie de six mois à deux ans de prison, et d'une amende de 360 à 7 200 francs ». À titre de comparaison, le Smic net s'élevait à 1 000 francs. Selon l'étude d'un conseiller à la Cour d'appel de Paris, 461 femmes ont été condamnées. Parmi elles, 4 cadres supérieures et épouses d'industriels, 141 ouvrières, 132 employées de maison, 123 fonctionnaires…

     

    À l'étranger ou illégalement. Les femmes qui veulent avorter n'ont que deux possibilités. Avoir les contacts et le temps de partir, grâce aux filières militantes, dans les hôpitaux anglais ou hollandais (350 000 Françaises y ont eu recours en 1972 et 1973). Si elles disposent de l'argent nécessaire, elles peuvent aussi avorter dans les cliniques suisses ou des établissements huppés, en France. Sinon, leur seule solution est d'agir clandestinement.

     

    L'horreur des avortements clandestins. Pratiqués souvent par des « faiseuses d'anges » incompétentes ou des professionnels parfois hostiles à l'IVG, les avortements clandestins sont traumatisants et dangereux: infections, mutilations, stérilité, décès... Drames personnels et problème majeur de santé publique : Simone Veil déplore « 300 000 avortements et 300 décès de femmes par an ».

     

    Partisans et opposants : des mois d'affrontements

     

    « Mon corps m'appartient ». Les féministes revendiquent la liberté sexuelle, la maternité assumée. Le Planning familial, le Mouvement de libération des femmes, Choisir, le MLAC sont mobilisés pour le droit à la contraception et à l'IVG. « Manifeste des 343 » femmes et personnalités affirmant avoir avorté (publié par Le Nouvel Observateur en 1971); procès médiatisé et gagné (Bobigny en 1972) ; Anne Sylvestre chante le fameux « Non, tu n'as pas de nom » (1973) manifestations colorées et tonitruantes dans les villes françaises... « Un enfant si je veux, quand je veux » : les actions se multiplient, les hommes se joignent aux cortèges.

     

    https://www.youtube.com/watch?v=myx5Kng5rSY

     

    Dans un sondage réalisé en septembre 1974, 76% des Français approuvent l'IVG pour des raisons sociales ou familiales (grand nombre d'enfants, ressources limitées). 69% si la mère est seule et sans revenus. 55% si elle est âgée de moins de 18 ans.

    « Laissez-les vivre ». Pour des raisons morales, religieuses ou natalistes, les adversaires d'une légalisation de l'avortement s'organisent et se font entendre. Des associations, notamment « Laissez-les vivre » créée en 1970 par le docteur Lejeune, sont très actives.

    Des Églises farouchement hostiles. Le Vatican rappelle instamment la doctrine de l'Église catholique : « La vie humaine doit être protégée et favorisée dès son début. Dieu n'a pas fait la mort. C'est objectivement un grave péché que d'oser prendre le risque d'un meurtre. » Pour le judaïsme, « ce n'est pas en ouvrant la porte à ce qu'on appelle communément un meurtre qu'on pourra édifier une société saine et viable ». Les musulmans n'ont pas une position commune : l'avortement peut être toléré quand la vie de la mère est en danger. La Fédération protestante est, elle, « favorable à une libéralisation de la loi ».

    Le corps médical divisé. En 1973, le Conseil de l'Ordre et 10000 praticiens ont signé une déclaration « Pour le respect de la vie ». A l'opposé, 330 médecins s'affirment en faveur de la liberté de l'avortement.

     

    25 heures de débats et 64 orateurs

     

    L'inconnue crève l'écran. Giscard d'Estaing et son Premier ministre Jacques Chirac ont choisi la ministre de la Santé pour défendre le projet de loi autorisant et encadrant l'avortement. Simone Veil est une magistrate de 47 ans, non-élue, mère de trois enfants. Ministre depuis six mois, elle est peu connue du grand public. Pour la première fois en France, les débats à l'Assemblée sont retransmis à la télévision. Et l'inconnue crève l'écran pendant vingt-cinq heures d'échanges virulents, passionnels.

    Des pleines rangées d'hommes. Le 26 novembre 1974 à 16 h, Simone Veil monte à la tribune. Face à elle, un hémicycle de costumes-cravates sombres et chemises blanches. Combien de députées à l'Assemblée ? Douze femmes ont été élues, pour 490 députés, soit 2,4% (contre 155 femmes sur 577 députés, soit 26,9% aujourd'hui). Mais en septembre 1974, seules neuf députées siègent. Les rangs du public ont été pris d'assaut, notamment par des féministes. L'ambiance est électrique. « Aucune femme ne recourt de gaieté de cœur à l'avortement. Il suffit d'écouter les femmes. » Pendant près d'une heure, la ministre détaille un projet qui veut mettre fin « au désordre. Et surtout, à l'injustice et à l'inégalité insupportables » qui frappent les femmes de milieux modestes. Confrontées à cette « épreuve », les riches et les pauvres ne sont pas égales. « Les pouvoirs publics ne peuvent plus éluder leurs responsabilités ». L'interruption de grossesse doit être « contrôlée et rester une exception, l'ultime recours. Il faut encourager la contraception par tous les moyens ».

     

    Il y a 40 ans, Simone Veil montait à la tribune

     Il y a 40 ans, Simone Veil montait à la tribune

     

    L'opposition est favorable au texte. La gauche juge les propositions insuffisantes et dépose des amendements. Néanmoins, l'opposition – y compris le parti communiste pourtant défenseur de politiques natalistes –, soutient ce texte qui est un premier pas, « une avancée décisive ». Pour le communiste Bernard Chambaz, « il faut en finir avec une législation répressive qui contraint à recourir à l'avortement clandestin, un des méfaits les plus tragiques du capitalisme ». Le socialiste Jacques-Antoine Gau estime qu'« une croyance ou un choix éthique ne saurait être imposé à tous. S'agissant de l'avortement, la loi n'a donc pas à transcrire une doctrine philosophique ou religieuse quelle qu'elle soit, mais à laisser à la conscience de chacun le soin de décider ».

     

    Convaincre son propre camp. Les opposants les plus acharnés sont des députés de la majorité. Ce que propose Simone Veil heurte profondément les convictions catholiques de députés de droite et du centre. Beaucoup d'élus vont s'exprimer « à titre personnel ».

     

    Le gaulliste Michel Debré plaide « pour le soutien aux mères de familles nombreuses », fustige « l'avortement pour convenances personnelles » et combat le texte, « monstrueuse erreur historique ». Jean Foyer (UDR) dénonce « un projet de résignation, de désespérance » et prédit « des avortoirs où s'entasseront les cadavres de petits hommes ». Pour Pierre Bas (UDR) « on ne fait pas d'expérimentation, fut-elle limitée à cinq ans, avec la morale, la civilisation de la France. On ne passe pas du régime du droit au régime du bon plaisir  ».

     

    Rares sont les interventions en faveur du projet du loi. Parmi elles, les discours remarqués des UDR Hélène Missoffe, Bernard Pons ou Lucien Neuwirth qui avait permis que la contraception soit légalisée en 1967.

     

    Propos ignobles. Pendant trois jours, Simone Veil est attaquée avec une brutalité inouïe. A l'Assemblée et jusque dans sa boîte aux lettres ou dans le hall de son immeuble, elle subit des discours, des courriers et des graffitis insultants, antisémites et obscènes.

     

    Elle encaisse. Elle prend des notes, apparemment impassible.

     

    À la tribune, Alexandre Bolo (UDR), Jacques Médecin ( Réformateur) ou le gaulliste Hector Rolland l'accusent de vouloir « instaurer l'euthanasie légale, de faire le choix du génocide ». Établir un parallèle entre l'avortement légal et les atrocités nazies est ignoble, a fortiori face à Simone Veil. En tant que juive, elle a vécu l'enfer des camps d'Auschwitz et de Bergen-Belsen. Ses parents et son frère sont morts en déportation.

     

    Le discours qui l'a le plus « blessée » et révulsée est celui du centriste Jean-Marie Daillet. Le député de la Manche l'interpelle : « On est allé jusqu'à déclarer qu'un embryon était un agresseur. Ces agresseurs, vous accepterez, madame, de les voir, comme cela se passe ailleurs, jetés au four crématoire ou remplir des poubelles. »

     

    La loi adoptée grâce a la gauche

     

    Au bout de la nuit. Dernier round à l'Assemblée le soir du 28 novembre 1974.

    Eugène Claudius-Petit (Réformateur) est l'ultime orateur. Ce catholique dit que « dans le regard de la femme la plus désemparée, la plus fautive, se reflète le visage de Celui qui est la vie. A cause de Lui, je prendrai ma part du fardeau. Je voterai le texte ».

    Enfin, la ministre de la Santé répond aux questions, aux doutes et aux attaques qui ont rythmé ces trois jours. Simone Veil est épuisée et combative. C'est le socialiste Jean-Pierre Cot qui a peut-être résumé le mieux les sentiments qu'elle inspire à l'opinion: « Madame, votre courage et votre détermination font l'admiration de vos amis comme de vos adversaires. »

    Suspense dans l'Hémicycle. Le 29 novembre, à 3h40, la loi est adoptée par 284 voix pour et 189 contre. Cas rarissime: le texte est approuvé grâce à l'opposition, aux 179 votes des socialistes, des communistes et des radicaux de gauche. Les sénateurs, ensuite, l'approuveront par 185 voix contre 88.

    A l'aube, Simone Veil rentre chez elle où une surprise l'attend. Jacques Chirac, le Premier ministre, lui a fait livrer une immense gerbe de fleurs.

     

    L'avortement autorisé sous conditions

     

    La nouvelle loi est approuvée pour une période de cinq ans. Elle autorise l'interruption volontaire de grossesse si elle est pratiquée par un médecin dans un hôpital public ou un établissement privé. La femme enceinte que son état place « en situation de détresse » peut demander à avorter. L'intervention doit être pratiquée avant la fin de la dixième semaine de grossesse.

     

    La « loi Veil » est promulguée le 17 janvier 1975.

     

    Article paru dans Ouest-France par Colette David, Patricia Vieillescazes et Janik Le Caïnec


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  • Les forces de l’ordre françaises et de six autres pays européens ont mis la main sur une série d’adolescents et de jeunes adultes qui se sont introduits dans les PC de particuliers, par plaisir ou pour réaliser des actions frauduleuse

    Coup de filet d’une quinzaine d’apprentis pirates

     

    Haro sur les « script kiddies » ! Europol et les forces de l’ordre de sept pays européens - dont la France - viennent d’interpeller cette semaine une quinzaine d’adolescents et de jeunes adultes pour s’être introduits dans les ordinateurs de particuliers au moyen de chevaux de Troie avec fonctions d’accès à distance (Remote Access Trojan, RAT). Comme par exemple Blackshades, Poisonivy ou DarkComet. Ces logiciels permettent de voler des données ou d’enregistrer l’activité d’un utilisateur.

    Parmi les 15 prévenus, 6 ont été arrêtés en France. Ils n’étaient pas liés les uns aux autres, mais opéraient de manière autonome. Ce ne sont pas non plus des hackers confirmés. Généralement, ils n’ont pas fait grand-chose de plus que d’acheter un kit de cheval de Troie sur Internet pour quelques dizaines d’euros. En revanche, « les motivations sont assez diverses. Certains ne voient dans ce type de piratage qu’une activité ludique. D’autres sont animés par une curiosité malsaine. D’autres encore vont réaliser des transactions bancaires frauduleuses », explique le colonel Eric Freyssinet, chef de la division de lutte contre la cybercriminalité (DLCC) du Service central de renseignement criminel de la Gendarmerie nationale. M. Freyssinet a coordonné, au niveau d’Europol, l’ensemble de cette opération qui a été baptisée «Mousetrap » (piège à souris).

    Alerter les parents

    Parmi les arrestations françaises, une seule résulte d’un dépôt de plainte. Toutes les autres font suite à des « enquêtes proactives » réalisées sur la Toile. Au total, l’opération a nécessité « quelques semaines de travail réparties sur plusieurs mois ». On peut se demander si ce travail en valait la chandelle, car les infractions ne semblent pas très graves. « Si c’est grave, rétorque le colonel. Certes, c’est de la petite délinquance, mais elle a atteint un niveau préoccupant. A tout instant, plusieurs dizaines de personnes s’adonnent à ce type d’activité en France, et cela le plus souvent en toute impunité. Cette opération nous permet de lancer un signal à ces jeunes et à leurs parents, ainsi qu’aux victimes, et cela de manière coordonnée en Europe. Elle nous permet aussi de rencontrer ces délinquants et de les analyser, pour mieux les comprendre. »

    Quoi qu’il en soit, les apprentis pirates qui viennent d’être arrêtés devront maintenant se confronter à la justice. L’utilisation de ce type de logiciels malveillants est punie par le Code pénal de peines pouvant aller jusqu’à sept ans d’emprisonnement suivant les circonstances (Art 323-3-1). Les six autres pays qui ont participé à l’opération « Mousetrap » sont l’Estonie, la Roumanie, la Lettonie, l’Italie, la Norvège et le Royaume-Uni.

    Article paru dans 01NET


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  • L’inventeur du « demi » fait toujours impression

    La maison Bofinger, où est né le fameuse demi de bière, dans les années 1860. | Photo : DR

     

    Il faudrait dresser une statue à Frédéric Bofinger, le restaurateur alsacien, qui ouvrit en 1864 une cantine où l’on découvrit pour la première fois le désormais fameux demi-pression.

    En 1864, alors que ses compatriotes rayonnent autour de la gare de l'Est, le restaurateur alsacien Frédéric Bofinger s'installe à la Bastille, à la lisière du Marais et du Faubourg Saint-Antoine, où de nombreux Alsaciens travaillent le bois. La bière d'Alsace est réputée pour être la meilleure, elle rafle toutes les médailles d'or à l'Exposition universelle de 1867...

    L’Alsace et la bière, c’est une vieille histoire. Certes, les Égyptiens l’ont inventée il y a six mille ans, les Gaulois l’ont popularisée en la surnommant « cervoise ». Mais il faut attendre le lent travail des moines trappistes entre le IXe et le XIIe siècles pour en améliorer la fermentation et l’épicer de houblon, réputé pour ses vertus antiseptiques.

     

    L’inventeur du « demi » fait toujours impression

    Chez Bofinger, rue de la Bastille, à l’origine une simple cantine créée par le jeune Alsacien Frédéric Bofinger. (Photo : DR)

     

    En Europe du Nord, on la déguste alors dans les abbayes auxquelles Charlemagne a conféré le monopole de fabrication et c’est à saint Louis que revient, entre autres bienfaits, le mérite de l’affranchir de ces saints lieux en créant, en 1268, le corps de métier des brasseurs.

    La fièvre dorée

    Les premières brasseries s’installent en Alsace et y prospèrent. En 1803, plus de 250 établissements tiennent le pavé à Strasbourg. Elles connaissent leur apogée entre 1855 et 1870, lors de l’invasion allemande. Et c’est à ce moment que Frédéric Bofinger profite de la ligne de chemin de fer Paris-Strasbourg pour gagner la capitale qui découvre elle aussi la fièvre dorée. Frédéric Bofinger n’a pas un sou en poche, mais plein d’idées dans la tête. Et il aime la bière.

     

    L’inventeur du « demi » fait toujours impression

    Gravure de la Gare Paris-Bastille inaugurée en 1859 par Napoléon III. (Photo : DR)

     

    Imaginez la place de la Bastille dans le Paris des années 1860. Moins d’un siècle a passé depuis la chute de la forteresse et les éclats sanglants de la guillotine révolutionnaire. Face au petit génie de la Liberté juché sur la colonne de Juillet, Napoléon III vient d’inaugurer la nouvelle gare de Paris-Bastille qui emmène les Parisiens vers les bords de Marne et les guinguettes.

    En 1864, alors que ses compatriotes rayonnent autour de la gare de l’Est, Frédéric Bofinger s’installe à la Bastille, à la lisière du Marais et du Faubourg Saint-Antoine, où de nombreux Alsaciens travaillent le bois. La bière d’Alsace est réputée pour être la meilleure, elle rafle toutes les médailles d’or à l’Exposition universelle de 1867.

     

    L’inventeur du « demi » fait toujours impression

    La pompe à pression, popularisée à Paris par Frédéric Bofinger, ici au Rallye Passy dans le XVIe. (Photo : DR)

     

    Bofinger passe marché avec la maison Cronenbourg – qui deviendra en 1947 Kronenbourg – et désaltère les Parisiens, assoiffés et heureux, au moyen d’un nouvel engin, la pompe à pression. Sa cantine qui n’occupe que quelques mètres de façade rue de la Bastille, est la première à servir ce que l’on nomme bientôt le demi « à la pression ».

    Nini Pot de Chien n’est jamais loin

    Le grand mérite de cette technique est de faciliter la conservation et le transport du breuvage instable. Et donc sa qualité. Après les amphores antiques, les tonneaux gaulois, les fûts métalliques apparus au XIXe siècle et l’augmentation de leur capacité (20, 60 et jusqu’à 400 litres) favorisent le débit et l’animation des lieux.

    La pression permet de tirer la bière que nous connaissons, fine, légère, pétillante ou veloutée sous la langue, avec sa mousse blanche plus ou moins épaisse que l’on lisse à l’aide d’une spatule et dont les excès s’écoulent lentement dans le rince verre.

     

    L’inventeur du « demi » fait toujours impression

    Améliorée dans les abbayes entre le IXe et le XIIe siècle, jusqu’à ce que Saint-Louis crée la confrérie des brasseurs, la bière vient surtout des abbayes trappistes d’Europe du Nord. (Photo : DR)

     

    De partout, on accourt rue de la Bastille, chez Bofinger, pour une bonne rasade bien fraîche. Servie dans des pots en grès que les clients apportent eux-mêmes, avec de la charcuterie et de la choucroute, ce n’est pas une boisson de fillette, elle titre entre 18 et 25°.

    En 1870, quand la Prusse annexe l’Alsace et la Lorraine, les réfugiés affluent dans Paris et assurent le succès de l’établissement. On y croise le chansonnier Aristide Bruant qui apporte ses propres œufs pour qu’on lui prépare « la plus savoureuse omelette du monde ». Nini Pot de Chien n’est jamais très loin.

    De François Mitterrand à Coluche…

    En 1906, après plus de quarante ans de comptoir, Frédéric Bofinger cède l’affaire à son gendre, Alfred Bruneau. Associé au maître d’hôtel Louis Barraud, il rachète la crèmerie, la boulangerie et l’entrepôt de charbon voisins pour créer d’élégants salons et la belle salle de la Coupole, ornée d’une immense verrière art déco.

     

    L’inventeur du « demi » fait toujours impression

    La maison s’agrandit et de beaux salons attirent la clientèle. L’un d’entre eux est décoré par le célèbre peintre Hansi avec les couleurs et les blasons de l’Alsace. (Photo : DR)

     

    En 1930, Bofinger est devenu une institution, portée par la belle enseigne dessinée tout exprès par le peintre alsacien Hansi. La France de la Belle Époque se régale de sa savoureuse cuisine.

    Pendant l’Exposition coloniale de 1931 dont les pavillons sont plantés dans le bois de Vincennes tout proche, on y sert 2 000 couverts par jour. 150 ans plus tard, Bofinger, repris en 1996 par le groupe Flo, continue de porter l’excellence culinaire française. François Mitterrand y a fêté son élection. Coluche avait coutume d’y réunir les Enfoirés et on y sert bien sûr toujours la bière à la pression. « Un demi, garçon, bien frais, s’il vous plaît ! »

     

    L’inventeur du « demi » fait toujours impression

    La brasserie est devenue une des tables les plus réputées de Paris. (Photo : DR)

    L’inventeur du « demi » fait toujours impression

     La grande verrière dans la salle de la coupole. (Photo : DR)


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  • Philae va-t-il pouvoir tirer les plans sur la comète ?

    Une photo de la surface de Tchouri prise par Philae, où l'on aperçoit un des pieds de la sonde. |  Photo ESA

    Malgré une position inconfortable, le robot Philae a commencé jeudi à recueillir des images spectaculaires de la comète Tchouri.

    Le robot Philae a commencé jeudi à recueillir des images spectaculaires de la comète Tchouri, malgré une position inconfortable, une patte « en l'air » et dans l'ombre, ce qui risque de diminuer l'efficacité de ses batteries solaires.

    Un bond de deux heures !

    Largué à plus de 500 millions de km de la Terre par la sonde européenne Rosetta, après dix ans de voyage avec elle, l'atterrisseur s'est posé mercredi sur le noyau de la comète Tchouri, tout d'abord à l'endroit prévu. Mais les harpons qui devaient l'arrimer au sol n'ont pas fonctionné et Philae a fait pendant près de deux heures « un énorme bond », d'environ un km, a expliqué jeudi Stephan Ulamec, responsable de l'atterrisseur.

    Le robot a fait ensuite un plus petit saut, beaucoup plus court, avant finalement de se stabiliser sur la comète, a-t-il ajouté lors d'un point de presse à l'Agence spatiale européenne (ESA) à Darmstadt (Allemagne). « Il y a eu une inflation d'atterrissages », a-t-il plaisanté.

    « Nous comprenons mieux comment nous avons atterri, mais nous ne savons pas encore exactement où », a-t-il dit.

    Position inconfortable

    L'atterrisseur n'est pas arrimé à la surface de la comète Tchourioumov-Guérassimenko, mais les instruments fonctionnent et envoient des images et des données.

    Philae va-t-il pouvoir tirer les plans sur la comète ?

    Une photo panoramique de la surface de Tchouri prise par Philae, représenté au centre dans la position qu'on lui imagine. | Photo ESA

    Elles montrent qu'il se trouve sur une pente inclinée, « presque à la verticale », avec une de ses trois pattes « à l'air ou plutôt tournée vers l'espace », selon Jean-Pierre Bibring, responsable scientifique de l'atterrissage.

    Le petit robot se trouve à côté d'une sorte de falaise menaçante. « Nous sommes à l'ombre et c'est une partie du problème », a admis M. Bibring. Philae ne reçoit qu'une heure et demie de soleil par jour au lieu des six ou sept heures nécessaires au bon fonctionnement de ses batteries solaires.

    L'ombre inquiète

    Philae est équipé d'une pile qui doit durer « 50 à 55 heures », selon Philippe Gaudon, chef du projet Rosetta au Centre national d'études spatiales (CNES) à Toulouse. Elle « fonctionne bien et lui fournit de l'énergie ».

    Ensuite, il est prévu que ses panneaux solaires prennent le relais pour alimenter des batteries rechargeables et poursuivent le travail à un rythme très ralenti.

    Mais l'endroit peu ensoleillé où se trouve le robot risque de poser problème. Cela écourtera peut-être son fonctionnement. En revanche, ses panneaux solaires ne semblent pas endommagés.

    « Nous pourrions essayer de mieux orienter » ces panneaux, a dit M. Bibring.

    Premières analyses en cours

    En attendant, Philae travaille bravement. Huit instruments scientifiques sur dix ont été activés. Le robot laboratoire s'est mis à radiographier l'intérieur de la comète, à étudier son magnétisme, à faire des images du sol, à analyser les molécules complexes dégagées par la surface.

    Le robot est chargé notamment de trouver sur le noyau de la comète des molécules organiques qui ont pu jouer un rôle dans l'apparition de la vie sur Terre, les comètes étant les objets les plus primitifs du système solaire.

    Pas de forage pour l'instant

    L'une de ses missions principales était d'aller forer le sol pour prélever un échantillon afin de l'analyser.

    Ce n'est pas prévu pour l'instant. « Nous sommes hésitants pour le moment à entreprendre ces forages (...). C'est dangereux parce que nous risquons de déséquilibrer l'atterrisseur », a précisé M. Ulamec.

    Le robot, qui pèse 100 kg sur la Terre, a une masse d'un gramme sur la comète.

    Il faudrait « une tension des harpons pour compenser la force de forage, sinon l'atterrisseur risque de se soulever », a relevé M. Gaudon. « Notre priorité est de continuer à faire des analyses scientifiques sans rien bouger » pour l'instant.

    Les responsables de la mission n'excluent toutefois pas de faire faire ultérieurement une manoeuvre à Philae pour le repositionner.

    Ensuite, hibernation

    Au départ, il était prévu que Philae fonctionne jusqu'en mars. Il entrera peut-être « en hibernation » et qui sait, « il se réveillera peut-être dans quelques mois », a avancé M. Ulamec. Il mourra ensuite de chaleur, lorsque la comète se rapprochera du Soleil.

    Mais la mission Rosetta sera loin d'être terminée. La sonde, qui a déjà parcouru 6,5 milliards de km dans l'espace, poursuivra son escorte de « Tchouri » au moins jusqu'au 13 août. C'est à cette date que la comète passera au plus près de l'astre.

    Philae va-t-il pouvoir tirer les plans sur la comète ?

    Tchouri photographiée à 3 km par Philae pendant la descente | Photo ESA

    L'atterrissage sur une comète est une première dans l'histoire de l'exploration spatiale, point d'orgue d'une aventure entamée il y a 20 ans, qui a coûté 1,3 milliard d'euros.

    « Ce qui est vraiment impressionnant, ce n'est pas le degré d'échec, mais le degré de succès », a tenu à souligner M. Bibring.

    Article paru dans Ouest-France


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