• Où l’on apprend à laisser faire les spécialistes.

    En voilà qui n’ont pas l’air commode ! Des personnages barbus et armés tiennent sur leur tête une petite sphère très décorée. Ce précieux objet est plus qu’une jolie sculpture : c’est une salière.

    Elle décorait la table de riches aristocrates de la Renaissance en Europe, notamment au Portugal. Même sa matière est précieuse, puisqu’il s’agit d’ivoire d’éléphant.

    Pourtant, au XVIème siècle, il n’y a pas l’ombre d’une trompe d’éléphant au Portugal…

     

    Ça ne manque pas de sel

     Salière, Royaume de Bénin, XVIe siècle, ivoire d’éléphant, 26 x 8 x 8,5 cm, Musée du quai Branly - Jacques Chirac, Paris © musée du quai Branly - Jacques Chirac, photo Thierry Ollivier, Michel Urtado
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    C’est parce qu’avant d’arriver en Europe, cette salière a pas mal voyagé ! À la Renaissance, les Portugais font du commerce avec le Royaume de Bénin (dans l’actuel Nigeria), sur la côte de l’Afrique.

    Les marchands achètent des défenses d’éléphants brutes, à une époque où ces animaux ne sont pas du tout protégés, et les rapportent chez eux. Bien vite, les Portugais sont frappés par le talent des artistes africains et leur passent directement commande…

     

    Ça ne manque pas de sel

     Détail de l’œuvre © musée du quai Branly - Jacques Chirac, photo Thierry Ollivier, Michel Urtado
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    C’est donc sans doute au royaume d'Owo, non loin du royaume de Bénin, que cette salière a été sculptée. Le décor est d’ailleurs une référence aux commanditaires, puisqu’il s’agit de soldats portugais !

    Les costumes, les chapeaux à plume, les crucifix en pendentif… tous les détails sont rendus avec une grande minutie. Avec un matériau aussi dur à sculpter que l’ivoire, c’est un vrai défi technique.

     

    Ça ne manque pas de sel

     Détail de l’œuvre © musée du quai Branly - Jacques Chirac, photo Thierry Ollivier, Michel Urtado
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    On ignore si cette salière a finalement contenu du sel. Ce dont on est sûr, c’est que son apparence a très tôt attiré l’œil des collectionneurs. Ils sont fascinés par son côté hybride : la forme inspirée de l’orfèvrerie et le sujet sont portugais, la technique et le style de sculpture viennent d’Afrique. C’est pourquoi, logiquement, on parle d’ivoire afro-portugais...

    Et aujourd’hui, leur rareté rend ces objets encore plus exceptionnels !

     

    Ça ne manque pas de sel

     Détail de l’œuvre © musée du quai Branly - Jacques Chirac, photo Thierry Ollivier, Michel Urtado
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    Pour en savoir plus :

    Cette salière est l'un des chefs-d’œuvre des collections du musée du quai Branly - Jacques Chirac... et elle n'est pas la seule à témoigner des échanges entre les pays africains et le reste du monde ! La passionnante exposition L'Afrique des routes ressuscite ces relations à travers des centaines d'objets rares et précieux (sculptures, bijoux, peintures...).

    Sur les mers et au cœur des déserts, ces routes commerciales millénaires donnent lieu à d'étranges découvertes... comme de la porcelaine chinoise à Madagascar !

     

    Ça ne manque pas de sel
     

     Article paru sur Artips


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