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Plongée dans le Paris d'avant Haussmann
Quand il nomme le baron Haussmann préfet de la Seine en 1853, Napoléon III le charge de « donner de l'air et de l'eau à Paris ». Il était plus que temps !
« Plus de quartiers lépreux, plus de ruelles miasmatiques, plus de masures humides où la misère s'accouple à l'épidémie [...]. Plus de tanières immondes, réceptacles du rachitisme […]. Les murailles pourries, salpêtrées et noires [...] s'effondrent pour laisser surgir de leurs décombres des habitations dignes de l'homme. » En 1855, dans sa préface de Paris démoli, Théophile Gauthier se réjouit d'assister à la transformation radicale de la capitale, opérée depuis deux ans par le baron Haussmann. Si l'écrivain est implacable dans sa description de la cité, il n'en demeure pas moins objectif. Car, à la moitié du XIXème siècle, la situation de paris est plus que critique.
Des quartiers sur peuplés
La révolution industrielle pousse le peuple des campagnes à venir chercher du travail dans les manufactures et les ateliers de la ville. La capitale est en situation de saturation démographique : en 1850, la population dépasse le million d'individus. Elle a presque doublé en cinquante ans. Les infrastructures ne sont pas adaptées à ce mouvement migratoire d'une ampleur inédite. La circulation, rendue presque impossible par le maillage de ruelles médiévales, pose notamment un problème. « Des gares ont été construites dans les années 1830 mais les voies de dégagement manquent cruellement, explique Patrice de Moncan, auteur de Paris avant/après et du Paris d'Haussmann. Imaginez les dizaines de milliers de calèches et omnibus tirés par les chevaux, se frayant un chemin dans un lacis de rues étroites, tortueuses et encombrées par une activité urbaine intense. Dans ce chaos, les accidents sont permanents ! Certaines rues ont des pavés en bois qui font chuter les chevaux dès qu'il se met à pleuvoir. La ville manque aussi de lumière. A la nuit tombée, les rues deviennent des coupe-gorge. »
Pauvreté et insalubrité
À cette époque, on dit de Paris que c'est une ville malade. « Les Parisiens vivent souvent dehors à cause des conditions d'habitation épouvantables, poursuit l'auteur. La plupart des rues sont étroites, ce qui rend le domicile sombre et humide. Il n'y a pas d'eau potable : les gens sont approvisionnés par des porteurs d'eau. » Rambuteau, préfet de la Seine entre 1833 et 1848, a bien fait installer quelques bornes-fontaines mais le nombre reste insuffisant. La capitale ne dispose pas non plus d'égouts, à part quelques kilomètres, trop étroits de surcroît. Si la bourgeoisie loge dans des hôtels particuliers du faubourg Saint-Germain et du Marais, le peuple vit par bien des aspects comme au Moyen Âge. « Dans les années 1830, un certain Frégier, commissaire de police, rapporte que, sur l'île de la Cité, on jette les eaux usées dans la cour, indique Patrice de Moncan. Il décrit aussi des escaliers parsemés d'excréments. Les gens balancent leurs seaux de déjections par la fenêtre, après avoir crié « eaux, eaux, eaux », à titre préventif. Tant pis pour ceux qui n'ont pas eu le temps de se pousser ! » Compte tenu de ces conditions d'hygiène, les microbes prolifèrent. En 1832, une violente épidémie de choléra décime plus de 18000 habitants en six mois. Une autre en 1849 en tue 16000.
Aux grands maux les grands remèdes
Il faut finir avec cette insalubrité mortifère. L'empereur Napoléon III charge le baron Haussmann d'une grande mission d'assainissement, baptisée « Paris embellie, Paris agrandie, Paris assainie ». En dix-sept années de travaux – qui finiront sous la IIIème République -, celui-ci va détruire 20000 maisons, bâtir 30000 immeubles, percer de larges avenues et boulevards, doter Paris de 600 kilomètres d'égouts, ajouter deux gares et développer les espaces verts ( les parcs des Buttes-Chaumont et Montsouris ainsi qu'une vingtaine de squares ). Enfin, en 1860, il étend la ville jusqu'aux fortifications de Thiers, annexant plusieurs communes telles Montmartre, Auteuil, Vaugirard... Il sera vivement critiqué par ses contemporains et, plus tard, par les nostalgiques d'un Paris révolu. Mais il aura fait entrer la capitale dans la modernité.
Carte de l'annexion. En grisé, Paris avant 1860, et sur fond blanc, les territoires qui rejoignent la capitale
La rue Champlain dans le quartier de Belleville, avant 1860
La Bièvre, qui prend sa source dans les Yvelines, se jetait dans la Seine au niveau de la gare d'Austerlitz. Elle a été recouverte en 1912
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